« Quand j’étais petit » : une web série dans laquelle les enfants filment leurs aînés

Ajouté le 15 nov. 2022, par Florence Batisse-Pichet
« Quand j’étais petit » : une web série dans laquelle les enfants filment leurs aînés

La web série Quand j’étais petit, prix « Émergence » de la fondation Audiens Générations - 6 octobre 2022. La lauréate Sophie Loridon aux côtés de François d’Orcival et Aude Merlet.
La web série Quand j’étais petit, prix « Émergence » de la fondation Audiens Générations - 6 octobre 2022. La lauréate Sophie Loridon aux côtés de François d’Orcival et Aude Merlet.
La web série Quand j’étais petit, prix « Émergence » de la fondation Audiens Générations - 6 octobre 2022. La lauréate Sophie Loridon aux côtés de François d’Orcival et Aude Merlet. ©Erwan Floc’h

Depuis 2007, la Fondation Audiens Générations - Institut de France récompense des initiatives culturelles traduisant une solidarité active entre les générations. Parmi les quatre lauréats dévoilés lors de la cérémonie du 6 octobre 2022, la web série Quand j’étais petit a obtenu le Prix Émergence, doté de 8 000 euros.

Après le succès de son premier documentaire autoproduit, Lucie, après moi le Déluge, la réalisatrice Sophie Loridon a décidé de poursuivre son travail autour de la transmission. C’est pour sa web série Quand j’étais petit qu’elle a été récompensée à travers son association Les films du Petit Prince.

Pouvez-vous nous résumer votre parcours ?

À l’âge de 15 ans, je suis tombée dans la marmite de l’audiovisuel et j’ai donc entrepris des études de cinéma. J’ai écrit mon premier scénario à 19 ans. Diplômée d’une maîtrise en audiovisuel et multimédia, j’ai enchaîné les jobs en télé, notamment à France 5, et j’ai beaucoup travaillé pour des émissions en direct. Puis ce fut le retour dans ma région natale : l’Isère. Après m’être occupée de mes enfants, j’ai participé à la création de Télé Grenoble et en 2014, je me suis impliquée dans le lancement de Cinédia, une maison de production pour des films institutionnels.

Vos débuts dans le documentaire ?

Réaliser un documentaire était un rêve que je portais en moi depuis toujours, mais je n’avais jamais pu me l’accorder. Il a finalement pris forme avec le film que j’ai consacré à ma cousine lointaine, Lucie Vareilles, une paysanne d’un petit village de Haute-Ardèche, une figure d’autrefois. Pour le montage, j’ai commencé avec des images tournées en 2008, ce qui donnait un côté vintage. Mon opiniâtreté à l’autoproduire a été payante puisque le film a cumulé plus de 10 000 entrées en salles lors des avant-premières en région Rhône-Alpes. Cela m’a ainsi ouvert les portes pour une sortie nationale en 2019, accompagnée d’une centaine de rencontres dans toute la France, ce qui a permis au film d’atteindre plus de 25 000 entrées. 

Quelle est la genèse de la web série Quand j’étais petit ?

J’ai toujours été fascinée par l’intergénérationnel. Il se trouve que j’habitais à Murianette, un village de 855 habitants, à côté de Grenoble. Je trouvais injuste que les vieux et les jeunes ne se croisent plus. C’est à partir de ce constat que j’ai démarré en 2016 la web série Quand j’étais petit à Murianette. L’objectif était de réaliser le portrait des ancien(e)s par des enfants. J’ai donc eu l’idée d’un rapprochement avec l’école primaire du village. Par tournage, les enfants étaient environ une dizaine, issus des classes de CM1 et CM2. Cela se déroulait sous la forme d’ateliers, durant le week-end, en périscolaire, en réunissant les familles. Les enfants se sont pris au jeu : ils ont aimé poser des questions. Certains portraits sont liés à des thèmes (l’immigration, un métier, la guerre, etc.) mais tous parlent de la vie quotidienne et des mœurs de l’époque.

Comment avez-vous financé ce projet ?

J’ai bénéficié d’une enveloppe globale sous forme d’aide citoyenne de 3 000 euros de Grenoble Alpes Métropole, du Département de l'Isère et de la commune de Murianette. Nous avons finalement réalisé sept portraits avec une équipe de bénévoles professionnels de l'audiovisuel.

Quelles sont les étapes autour de la réalisation de chaque portrait ?

Les parents jouent un rôle déterminant car il s’agit d’une activité périscolaire. En amont, il y a une préparation pour que je puisse identifier l’histoire de chaque personne.  Les enfants vont en parallèle préparer les questions avec leurs parents. Aussi en amont du tournage, on leur propose un atelier d’initiation à la vidéo. Lorsque le jour de l’interview arrive, les enfants tournent sur plusieurs postes (caméraman, ingé son, journaliste) selon leurs envies. On intègre aussi le dessin. La découverte du film monté est attendue par tous avec impatience.

Dessin Credit EMDÉ.-1.jpg

Combien de portraits avez-vous réalisés ?

Depuis le début du projet, nous avons réalisé six portraits - deux personnes sont hélas déjà décédées - ce qui souligne le caractère précieux de ces films. Un septième est en cours de montage : il a été tourné au printemps dernier avec les mêmes enfants, six ans après !

Quel est le relais de diffusion ?

La web série est accessible sur une chaîne YouTube dédiée et chaque portrait a fait l’objet d’une projection dans le village. C’est une joie pour les anciens qui sont mis à l’honneur : ils sont heureux de cette reconnaissance. La série a également été diffusée en boucle sur la télé locale. 

Quelle est votre ambition aujourd’hui ?

Changer le regard sur nos aînés, créer du lien entre générations, sur le long terme et sans limite de temps.  L’idée est que la chaîne YouTube accueille d’autres portraits. Je souhaite élargir cette initiative, sous la forme d’une bibliothèque singulière de mémoires, à laquelle tout réalisateur pourra contribuer. Cela permettra de constituer un quadrillage de tout le territoire. Et dans un second temps, j’aimerais en faire un documentaire. Il y a eu de tels changements sociétaux que cela vaut le coup de garder des repères et des traces ! Comment imaginer qu’il y avait seulement trois voitures dans ce village il y a 70 ans ? N’oublions pas qu’on pouvait vivre avec seulement une cheminée, et sans eau courante !

Avez-vous un cahier des charges ?  

J’aimerais que les portraits soient réalisés dans le même état d’esprit, c’est-à-dire à travers des questions d’enfants qui apportent une fraîcheur dans la transmission. De même, le format de 20 min permet de laisser le temps nécessaire afin d’entrer dans la rencontre. En revanche, chaque projet peut avoir sa propre couleur avec des modalités différentes. Il peut être mené à l’initiative d’un réalisateur en lien avec une école, une MJC, une maison de retraite, etc. J’ai mis en ligne le site dédié quandjetaispetit.fr, qui reprend toute la méthodologie.

Quelle est l’enveloppe budgétaire nécessaire par portrait ? 

Par film, on a fait une estimation d’une enveloppe de 5 500 euros de coûts réels, soit trois jours de préparation et production ; quatre professionnels sur le tournage, un dessinateur, deux cadreurs et un réalisateur ; cinq jours de montage et de post-production, le matériel et les frais. Mais avec une part de bénévolat, un film peut être réalisé à partir de 4 000 euros.

Votre priorité ?

Je m’emploie à faire connaître ce projet par le biais des médias régionaux et nationaux, afin que la chaîne nouvellement mise en ligne puisse prendre son envol. Il s’agit de sensibiliser les institutions et toucher les villages, les villes et les quartiers des cités. J’ai également mis en place une campagne de crowdfunding. Le prix Émergence de la Fondation Audiens Générations est non seulement une belle reconnaissance mais par sa dotation, il donne un sacré coup de pouce à l’association.

Votre actualité ?

Je prépare un documentaire sur une agricultrice que je porte depuis plusieurs années. 

 

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